"Sans-titre"
MITCH, Stalingrad — Paris, commissariat Claire Bresson

photographies Sean McLoughlin

2023

Une voiture passe dans la rue, sa lumière dessine un parcours d’une mécanique astrale sur le plafond de la maison, curieuse chose puisqu’il n’y a pas de fenêtre... transfert d’un onirisme silencieux ? D’un héroïsme du quotidien ? Mais pour sûr, d’un prisme toujours isolé. Dans les pièces enfermées, nous nous savons exister, mais personne d’autre ne le sait, si même les spectres qui appartiennent à la main de l’artiste ne le savent aussi. Jules tend d’ouvrir ces brèches silencieuses, habitable emmuré, de celles qui ont cette fâcheuse tendance à n’appartenir qu’à son habitant, son parcourant.

Les aplats de couleur à la craie, à l’acrylique aussi, comme un puzzle qui conçoit l’image mentale de nos mémoires aux espaces “je me souviens d’une couleur, tout se redessiner dans ma mémoire”, se définit d’une identité réunie, retrouvée. Ces aplats, comme une projection émotionnelle parfois autonome, personnelle à l’espace si nous pouvons même parler d’une personnalité propre à ces murs, à leurs histoires, se prononce d’un fauvisme, si je puis dire, surréaliste. Mais, n’y a-t-il pas de plus belle réalité d’un accord parfait à nos paysages, comme transfert de nos poésies ? Comme si les murs et leurs couleurs, les ombres et les lumières, les objets et autres choses qui n’ont que faire que d’être là, présents, qui ne demandent rien ni à personne, nous avaient finalement validé, tout juste accepté à leur faire de l’ombre, de la lumière, de la couleur.

Bien sûr nous parlerons de dessins face aux formats de certaines fenêtres, non pas sur l’extérieur, mais bel et bien vers l’intérieur pour participer au concept de dimension, il en est question, geste dessiné que Jules traverse depuis ses études aux beaux-arts. Cela pourrait nous rappeler, les “chambres” de Dominique Gonzalez-Foerster, des pièces vides, parfois habitées d’un objet au sol, une pile de livres. Des chambres éclairées d’une couleur, rouge, orange ou bleue, comme projection mentale d’un frontal précieux qu’une couleur, par sa présence est synonyme de narration. C’est cette première impression que j’ai eu à la rencontre du travail de Jules; une narration par projection couleur, une histoire qui n’en dit pas trop, il serait trop violent d’en forcer les secrets des habitants, des murs qui en témoignent, puisque la pierre devient “patrimoine” d’un récit dépendant, indépendant à la fois, de cette contemplation domestique, de cette conversation sans mot, d’une temporalité perdue entre leurs prismes réunis.

Salomé Garcia, 2023

"Portraits, autoportraits & fleurs séchées"
Villa Radet, Cité internationale des arts — Paris

photographies Sinae Lee

2024
"Close-up!"
Neuvitec95 — Neuville-sur-Oise, commissariat Camille Martin

photographies Nadezhda Ermakova

2024

Comme le geste serait de poser un miroir perpendiculaire à une image pour une dualité parfaite, de ce geste Jules ouvre au diptyque, à un duo mais également à la rencontre pour une forme complète, qui se préserve de figuration. Ce geste lui apporte une science nouvelle, une histoire brisée pour un nouveau dialogue. Nous sommes donc toujours face aux dimensions d’espaces, il en est certain. De quel espace parlons-nous ?

Bien entendu leurs unions ne sont pas dissociables. Jules appuit ce fait par leurs nominations, deux dates éloignées par diptyque, un parcours entre celles-ci, une temporalité balisée par deux aiguilles posées sur la ligne du temps, du temps de production par l’artiste de chaque peinture, ou d’existence entre un moment de vie et un autre.

Que c’est-il passé entre ces deux dates ? Ne serait-il pas simplement une représentation des dimensions passées/futures misent en image par Jules, pour dire qu’elles ne peuvent se concevoir sans une certaine rencontre au travers de l’histoire d’une identité. Par-delà les images, aux couleurs travaillées, irisées, sous leurs formats, Jules nous propose des portes. Leurs placements en espace d’accrochage se font au ras du sol, mettant en lumière une dimension portuaire. Quand ces multiples diptyques se trouvent alignées sur les murs, la proposition nous est faite.

Quelle porte pour quel chemin, quel choix, est-il réversible ? Nous proposant le mystère qu’elles habitent, aux réponses cachées derrière une sensibilité mystique et spirituelle. Cela pour chacun·e d’entre nous, en se dissociant de sa propre présentation d’artiste pour l’autonomie des regards, de celle de son oeuvre. Le deux devient donc le symbole même de tout son mystique. Le trois n’y a pas sa place, celui-ci apporterait une élévation, une hiérarchie religieuse, au père ou bien même politique. Cette dualité cherche une réflection ancrée à la terre et respecte le choix des croyances. Le deux reste à cette surface linéaire, terrestre, comme une sensibilité humaine, animale, végétale, instinctive.

Ces images nous présentent, dans l’esthétique de leurs formes et leurs couleurs une psyché d’un espace incarné par le vivant, par l’esprit du vivant, pour en pénétrer les récits sensibles que le test de Rorschach, ces fameuses taches d’encre noire symétriques utilisées en psychologie, viennent dessiner les rapports que nous avons au monde à la vue des formes, entre l’irréalité du langage présenté et notre potentielle lecture symbolique aux choses qui nous entourent.

Salomé Garcia, 2023

"Biennale de la jeune création"
La Graineterie — Houilles-Carrières, commissariat Alexandra Servel

photographies Marc Dommage & sculpture Jordan Roger

2022

Lorsque Jules Bertin a commencé à peindre, il cherchait avant tout une certaine virtuosité, représentant méticuleusement des façades de maisons et d’immeubles, souvent d’après photographie. Par la suite, de l’extérieur et de la froideur de l’architecture, il est passé à des espaces plus intérieurs, intimes et introspectifs. D’abord, il a été question de mystérieuses salles de cinéma, aux sièges bien éloignés les uns des autres et aux projecteurs éblouissants, toujours vidées de leurs spectateurs. Depuis quelque temps, Jules Bertin peint plutôt des chambres : chambres solitaires ou conjugales, dans tous les cas des lieux où là encore la présence humaine n’est qu’indicielle. Ici, c’est un lit défait, là des chaises qui semblent avoir été bousculées ou une table remisée contre un mur pour révéler la nudité de la pièce. Ses peintures fantomatiques – à l’acrylique, au pastel ou les deux mêlés – nous placent dans une position délicate : nos corps n’y sont pas (encore), mais nous n’en sommes pas non plus les voyeurs. Dans ces espaces cubiques, les arêtes s’avèrent floues, et la géométrie est changeante; les chambres se déplient sous nos yeux comme des châteaux de cartes, les murs se courbent ou s’affaissent. Quelque chose étouffe, et si les cloisons semblent pour certaines transparentes, les fenêtres s’opacifient, refusant un quelconque paysage extérieur au profit d’un panorama pleinement imaginaire. Quand il évoque ses Chambres, Jules Bertin convoque un vocabulaire fusionnel : il aimerait que nous puissions être happés par elles, que leurs grands formats nous incitent à faire quelques pas pour y entrer.

Ces derniers temps, il a même fait encore plus de place aux corps, qui n’apparaissent jamais dans ses oeuvres : il a vidé de plus en plus ses pièces, reléguant les affiches, les fauteuils, les tapis. L’invitation n’en est que plus ambiguë, car il faut bien le signaler, la grande majorité de ces chambres ne possède aucune porte de sortie, et l’enfermement guette. À moins que ce recentrement sur soi ne soit d’abord une invitation à une contemplation silencieuse.

Camille Paulhan, 2022

"Start down, end up"
Neuvitec95 — Neuville-sur-Oise, commissariat Iris Fabre & Sinae Lee

photographies Wonwoo Kim & sculpture Chaelin Jeon

2021
"Gros tas de grotte 2"
carrière — Crépy-en-Valois, commissariat Loup Bahroune

photographies Jules Bertin

2020
"Contouring"
Arty Family — Paris, comissariat Claire Bresson & Jules Bertin
photographies Simon Pillaud
2019
Vues d’accrochages ENSAPC
2016 — 2021